Il y a des grossesses qui durent des années d espoir - Marina Tsvétaeva

Source: Pinterest
"Lorsqu’Emilie m’a demandé d’écrire quelques lignes sur ma grossesse j’ai accepté, volontiers, mais je me suis rapidement demandé ce que j’allais bien pouvoir dire. Notre parcours, a été quelque peu atypique, mais beaucoup de couples le partagent : nous avons été aidé par la procréation médicale assistée et notamment deux fécondations in vitro pour que je sois enceinte. Je passe sur les douleurs chroniques quotidiennes depuis des années, le parcours du combattant (avec option réunion sur l’adoption), les questionnements existentiels, les réflexions du corps médical, le regard de la société sur la maternité, le grand sentiment d’impuissance, de vulnérabilité et bien sûr de culpabilité.
Étonnamment j’oublie parfois lors de mes visites médicales mensuelles de signaler au soignant ce fait. 
Pas tout à fait depuis le début, puisque les premiers mois de ma grossesse j’avais encore des douleurs quotidiennes, auxquelles s’additionnaient l’angoisse que tout s’arrête du jour au lendemain comme depuis le début du traitement. Il y a toujours une « deadline ». L’insécurité est constante.
Je me suis dit que j’allais justement parler du moment où je me suis sentie véritablement enceinte, que j’ai réellement intellectualisé et ressenti dans mon corps que j’avais un fœtus en moi qui se développait et qui serait bientôt un nouvel être humain.
Chaque femme vit sa grossesse de manière singulière, à travers ses sensations, ses expériences, son rapport au corps et au monde, ses pensées mais aussi sa culture et son mode de vie.
Voici donc un nuage subjectif de mes sentiments :
Je me suis sentie enceinte le deuxième jour où je n’ai pas ressenti de douleurs. Pas le premier parce que c’était déjà arrivé, mais le second jour consécutif où je n’ai pas souffert dans mon corps, ce qui n’était pas arrivé depuis des années. Il se trouve que cela correspondait avec le début des sensations lorsque le fœtus bougeait (entre le 4 ème et le 5 ème mois de grossesse), et que j’ai eu le sentiment que l’on attendait vraiment un enfant à deux lorsque mon compagnon a pu sentir pour la première fois ces mouvements de vie.  Pour une fois, je pouvais partager avec lui une sensation physique agréable qui ne dépendait ni de lui ni de moi, mais qui nous unissait malgré la différence de perception, le sujet qui nous le procurait étant le même. De plus cela semblait comme            « valider » l’existence de ma grossesse, on était deux à le sentir, à le voir, cela devait être vrai.
Depuis ce jour où je me suis sentie future mère, je me suis aussi sentie remplie d’amour, de reconnaissance pour mon conjoint et pour cet enfant à venir. Cela doit paraître ridicule mais c’est un truisme. Je suis comme dans une bulle avec Stevie Wonder en fond sonore, parfois il y a quelques turpitudes dans ce ciel bleu, qui chahutent ma bulle, mais je tends à y rester confiner, à l’abri du monde extérieur, des conseils, des avis et des intrusions désagréables.

La chambre n’est pas prête. Nous n’avons effectué aucun achat ni aucune préparation (si ce n’est la nécessaire préparation à l’accouchement à l’hôpital dont je me sens toujours un peu « étrangère » depuis le début, l’hôpital où j’ai subi les traitements, les envahissements dans mon corps et dans ma vie intime, lieu de violence mais aussi de réconfort et de soulagement, où je me sens toujours un peu « à côté de moi » mais paradoxalement où je me remets à mon médecin qui sait m’apporter la sérénité et le pragmatisme nécessaire au bon déroulement de cette grossesse) et je suis enceinte de 8 mois… Mais on sait que l’on fera bien comme on pourra avec ce que nous serons à l’arrivée de ce petit d’homme, que la meilleure des gigoteuses c’est l’amour. Et quand je regarde l’homme que j’aime, je l’aime encore plus. C’est peut-être l’effet des hormones….ou pas…."

Merci à ma tendre amie de s'être autant livré, j'espère que ce texte vous fera le même effet qu'à moi.

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